Demain, le 10 octobre, chaque année depuis 1992, c’est la Journée mondiale de la santé mentale. Une journée consacrée à éduquer et à sensibiliser le public sur ce sujet trop souvent stigmatisé, mais qui nous tient beaucoup à cœur.
C’est la raison pour laquelle on prend nos plumes en duo aujourd’hui, pour apporter notre petite pierre à l’édifice de cette journée de demain. Alors la santé mentale, qu’est ce que c’est exactement ? Pourquoi ça reste encore un sujet tabou ? Comment on fait pour que les choses changent et qu’on prenne enfin soin de notre santé mentale de façon simple et positive ?
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La santé mentale, qu’est ce que c’est ?
L’OMS définit la santé mentale comme un “état de complet bien-être physique, mental et social”. C’est donc un très vaste domaine qui impacte tous les domaines de notre vie personnelle, affective et aussi professionnelle.
Le spectre de la santé mentale inclut bien sûr la prévention et le traitement des troubles mentaux. Sur ce point, les chiffres sont là et ils sont alarmants : selon l’OMS, les troubles de la santé mentale (dépression, bipolarité, anxiété, addictions, schizophrénie…) touchent une personne sur cinq dans le monde. La dépression sera la deuxième cause de maladie et d’arrêts de travail en 2020 (source Figaro Santé). En France, les troubles mentaux représentent le premier poste de dépenses de l’assurance maladie avec €20Mds/an (devant le cancer et les maladies cardio-vasculaires). Nous sommes donc tous, directement ou indirectement, concernés.
Mais, contrairement aux idées reçues, et si on se réfère à la définition de l’OMS, la santé mentale ce n’est pas seulement ce qui concerne les maladies et troubles mentaux. C’est tout simplement le fait de se sentir bien dans sa tête, dans son corps et dans sa vie. On a tous des questionnements : difficulté dans le couple, avec un enfant, insomnies, envie de se sentir plus calme, de ralentir le rythme… Et tous ces sujets du quotidien relèvent, eux aussi, aussi de la santé mentale.
Prendre soin de sa santé mentale, ce n’est donc pas uniquement synonyme de résoudre un problème. C’est simplement une hygiène de vie, qui consiste à rester attentif à son bien-être, parfois en faisant appel à une aide extérieure. Pourtant, alors que prendre soin de sa santé physique en faisant du sport par exemple est valorisé et naturel, il nous est moins facile d’aborder le sujet de la santé mentale, de demander des conseils, d’oser parler de nos difficultés…Pourquoi cela ?
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Un sujet qui reste tabou, pourquoi ?
Une question d’éducation
L’éducation que nous, adultes, avons reçue est ainsi faite : à l’école comme à la maison, on nous a appris à faire. Faire nos lacets, faire nos devoirs, faire des lignes d’écritures sans ratures. Les lignes bougent aujourd’hui et on s’en réjouit, mais dans les années 80-90, on ne nous a pas appris à être et à ressentir. Savoir verbaliser ses émotions, ses ressentis, surmonter un échec et oser mettre des mots dessus, c’est difficile et surtout : ce n’est pas inné. Et lorsqu’on n’a pas appris à le faire enfant, c’est comme tout, ça fait d’autant plus peur à l’âge adulte.
Un monde invisible
La plupart du temps, notre état de santé physique est perceptible de l’extérieur. On voit facilement que quelqu’un a une jambe cassée ou une grippe. Il nous est alors facile et naturel de témoigner de la sollicitude à cette personne, de prendre de ses nouvelles, de lui proposer de l’aide… La santé mentale relève, bien souvent, de l’invisible. Et parce que notre état mental est invisible il peut être très tentant (et relativement facile), quand on ne va pas très bien… de vouloir le cacher. C’est le piège de la honte, dont Laura a longuement parlé au sujet du burn-out. Dans ce cas là, on s’enferme et personne n’ose proposer son aide. A l’inverse, même si on en parle librement, c’est peut-être les autres qui ont envie de rendre invisible ce sujet, jugé trop gênant, trop personnel, trop inquiétant.
Ignorance et peur, un ancrage culturel fort
Inquiétant oui, parce qu’on ne connaît pas bien la santé mentale, et comme tout ce qu’on connaît mal, ça fait peur. Ces dernières années, beaucoup de termes sont passés dans le langage courant : on a tous entendu parler de burn-out, de dépression, de syndrome Asperger, de pervers-manipulateur… Mais souvent, on ne connaît pas les subtilités derrière ces troubles, et on est tenté de tout mettre dans le même panier : celui des gens qui ont “un problème”.
Comme le révèle une enquête Ipsos FondaMental-Klesia (2014) : deux français sur cinq associent la maladie mentale à la folie. L’ancrage culturel est en effet très fort sur ce point : avoir un sujet de santé mentale dans sa vie et le prendre à bras le corps, ce serait être faible, nul…voire fou !
Nous pensons tout l’inverse. Vouloir prendre soin de sa santé mentale et même travailler sur un questionnement quand il y en a c’est sain, courageux, et tout le monde devrait le faire en toute liberté. Mais alors, comment faire changer les lignes ?
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Apprendre à prendre soin de son mental
Une nécessaire déstigmatisation du sujet
Nous sommes convaincus que le premier pas consiste à libérer la parole. Mettre des mots sur ce qui est, sur ce qu’on ressent, sur ce qu’on vit. En faire un sujet totalement normal et même célébré; c’est d’ailleurs le noble objectif de cette Journée Mondial de la Santé Mentale. Prenons le temps d’explorer nos émotions, ce qui se passe dans notre tête. Et parlons-en, librement.
Un enjeu de faciliter l’accès à l’accompagnement
Libérer la parole est important mais ce n’est pas suffisant. Parfois, on se retrouve bloqué dans nos questionnements, on ne trouve pas de solution. Et on se rend alors compte qu’il est difficile de se faire accompagner quand on en ressent le besoin. Le prix des thérapies est une première barrière (~80-100€ la séance en France), d’autant que ce n’est que très rarement pris en charge par les mutuelles. La seconde barrière repose dans la complexité de trouver le bon praticien. Psychologue, psychothérapeutes, psycho-praticiens, thérapies brèves, longues, TCC, EMDR, psychanalyse… – on se perd rapidement dans cet univers et c’est totalement normal. Il y a donc un réel enjeu d’éducation sur ce sujet et d’accompagnement pour le rendre accessible à tous. Cet enjeu peut être transformé en opportunités pour les entreprises.
Un rôle majeur d’acteurs jusque là discrets : les entreprises
Nous passons près de 100 000 heures au travail au cours de notre vie. Avec une journée de dix heures, cela représente environ les deux tiers du temps éveillé. Pourtant, le sujet de la santé mentale est encore très peu abordé en entreprise. On parle essentiellement de « gestion de crise » ou de « RPS » (risques psycho-sociaux). Mais faut-il attendre qu’il y ait une « crise » ou un « risque » pour parler de santé mentale ?
Il est vrai qu’il n’est pas facile pour une entreprise d’aborder ce sujet : peur d’interférer dans la vie de ses collaborateurs, de ne pas trouver de solutions pertinentes, manque de neutralité…
Pourtant de plus en plus d’entreprises s’y mettent. Et les leaders de ces entreprises n’hésitent pas à partager leur propre expérience pour normaliser le sujet auprès de leurs collaborateurs. Si c’est encore majoritairement outre-atlantique, de plus en plus d’acteurs en France et en Europe mettent le sujet du mental sur le devant de la scène. Nous sommes ravis de voir que les lignes commencent à bouger !
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Les auteurs de cet article :
- Laura Terol est la fondatrice du blog et du podcast “Un cadeau mal emballé” qui a pour but de partager des témoignages et conseils pour comprendre le burn-out et faire de cette épreuve une chance
- Pierre-Etienne Bidon est le co-fondateur de moka.care, une entreprise qui a pour ambition de permettre à chaque collaborateur de prendre soin de son mental de façon simple et positive
Très bonne réflexion. C’est clair que de plus en plus de gens « se font déborder » par leur mental, et la pression psychologique que peut leur provoquer le travail ou le rythme de nos vies modernes. Je pense cependant que ce n’est pas la même situation dans tous les pays du monde et que nous, occidentaux avons beaucoup à apprendre sur ce plan de la philosophie des pays d’Asie.
Merci Nicolas ! Tu as tout à fait raison, c’est très occidental comme problème je crois ! On essaie de s’inspirer un peu de l’orient avec l’émergence par exemple de la méditation, mais on l’interprète avec nos visions occidentales donc ce n’est pas encore tout à fait ça. Mais l’essentiel c’est d’y travailler 😉
La santé mentale est un sujet qui devient de plus en plus présent et, fort heureusement, commence à sortir de l’anonymat des salles de consultations psychologique et psychiatrique. Enfin je veux dire santé mentale provenant de dissonance cognitive envers la vie que l’on mêne et non santé mentale issu de troubles physique et neurologique du cerveau, bien que ces derniers peuvent être également issus de certains de nos modes de vie … enfin tout cela pour dire que le sujet de la santé mentale est très vaste et y consacrer une journée ou un article est un pas supplémentaire pour lui permettre de passer de l’invisible au visible .
Exactement Eric, on est heureux de savoir que cette journée existe, et d’avoir apporté notre petite pierre à l’édifice ! Merci pour ton commentaire
Merci pour cette article qui est tellement d’actualité. Cela affecte tout le monde. En ce qui me concerne, je pratique le home office depuis quelques mois et je n’ai jamais autant ressenti le besoin d’être attentif à ma santé mentale. Malheureusement, pour les cas plus graves, cela affecte la communication ou la personnalité et nous avons tendance à associer leur identité à leur maladie. Moins de jugement permettrait aux personnes touchées de se libérer et accepter de se faire aider.
Hello Walid, effectivement j’ai beaucoup entendu dire autour de moi que le contexte covid et donc télétravail avait eu un gros impact pour beaucoup de gens. C’est essentiel d’en avoir conscience pour pouvoir agir ! Bonne continuation.
Très bel article : beaucoup d’humanité et de bienveillance pour traiter un sujet qui nécessite effectivement d’être déstigmatisé ! Prendre soin de soi et de son mental au quotiden pour éviter de décompenser quand cela ne va vraiment plus – et contribuer à ce que ce cela soit reconnu comme sain plutôt que perçu comme honteux – c’est un très bel objectif 🙂 Bonne continuation !
Merci beaucoup Gaël ! Je file découvrir petit mais costaud,le titre m’intrigue 🙂
Merci Laura pour ce sujet. Oui la santé mentale est un tabou. D’ailleurs l’idée d’aller voir un psychothérapeute fait peur aussi parfois. « non, non, je n’ai pas besoin d’un psy me disent certains clients ».
Pourtant nous avons tous besoin de prendre soin de notre santé mentale. Nous avons tous besoin d’un psychothérapeute à un moment de notre vie. C’est vrai qu’il faut du courage et de l’humilité pour oser aborder ce que nous avons enfoui, mais ça vaut le coup pour avancer plus librement. D’ailleurs pour moi qui suis coaching professionnelle, être dans une démarche de développement personnel et avoir un thérapeute, fait partie de la charte de déontologie de la fédération européenne de coaching EMCC que signent les coachs.
Hello Astrid, tu soulignes effectivement un point super intéressant que j’ai appris il y a peu : pour être coach il est nécessaire de suivre un accompagnement soi-même, je trouve ça à la fois rassurant et génial, ça aide tellement à déstigmatiser le sujet !
Très bon article, qui fait réfléchir, merci 😉
Merci beaucoup Brieg !
Bonjour Laura et Pierre-Etienne,
Oui je suis tout à fait d’accord, c’est tabou.
Parler de ses sentiments, les montrer, mais qu’est ce que c’est difficile en société!
Le jugement des autres et l’absence de bienveillance dans notre société devraient disparaitre.
Il y a encore du chemin à parcourir et c’est déjà beaucoup que le train soit sur les rails!
Merci pour cet article!
Merci Alice pour ton commentaire ! Il reste du chemin à faire tu as raison, mais on sent que les lignes commencent à bouger, notamment chez les plus jeunes, et on va tout faire pour que ça se poursuive !
Bonjour et merci pour cet article qui mets l’accent sur le tabou de la santé mentale. Effectivement quand on dit « j’ai rendez-vous chez mon psy » tout d’un coup les discussions s’arrêtent et les regards se tournent vers nous… presque accusateurs, ou tout du moins interrogateurs. 🤨
Heureusement, la tendance commence à s’inverser et les jeunes commencent (on dirait) à s’intéresser et à assumer le fait qu’ils puissent avoir besoin de parler, ou d’un accompagnement. (je l’ai remarqué avec des clients dans le coaching ) Tant mieux ! on est sur la bonne voie 😊
Hello Yseult (j’aime beaucoup ton prénom :)), je suis d’accord avec toi : les choses sont a priori en train d’évoluer pour les jeunes générations, et c’est tant mieux !
J’ai l’impression que la santé mentale ne devient préoccupante qu’à partir du moment où on vit une crise (épuisement mentale, burnout, boreout,etc…). Et comme vous le dites très bien, c’est un sujet dont on ne parle pas. Par exemple, je ne connais qu’une seule personne de mon entourage agrandit qui a vécu un épuisement mental. Et il a mis plusieurs années pour le reconnaître.
Bonjour Guillaume, merci pour ton commentaire. Tu le dis très bien, ça ne devient un sujet que quand on vit une crise, et c’est exactement ça qu’on veut faire changer 🙂
Très bon article, merci beaucoup pour toutes ces précisions. Bonne continuation pour la suite 🙂
Merci Hinarii, au plaisir de te lire !
Merci pour ce bel article !
Tellement d’actualité ! Notre mental est mis à rude épreuve en ce moment et ces conseils sont indispensables.
Merci Jung ! Tu as raison, le contexte actuel nous met en difficultés, et il est d’autant plus important de prendre soin de soi en cette période. Bon courage !
Ton article est très intéressant car il amène à la réflexion. On confond souvent aussi maladie mentale et handicap mental. Le sujet est très vaste. Merci de l’avoir abordé.
Hello Corinne, merci pour ton commentaire. Tu as raison, il y a aussi la question du handicap mental, qui fait tout aussi peur : vaste sujet !
Entièrement d’accord avec toi, tout vient de l’éducation. Il ne faut surtout pas s’exprimer et encore moins exprimer ses émotions. C’est perçu comme une faiblesse. Ridicule. Du coup les gens n’osent pas formaliser leurs ressentis et garde en eux leurs frustrations. Et quand ça sort, ça explose, d’où la multiplication des conflits.
Merci pour cet article.
Merci Luc pour ton message. Je n’ai pas encore d’enfants, mais j’aimerais beaucoup faire « mieux » sur ce point là auprès d’eux 🙂